Dans le contexte actuel, les sanctions économiques et financières sont logiquement devenues le principal outil mobilisé et mobilisable pour répondre à l’agression de Poutine. Contrairement à ce que l’on dit souvent, elles peuvent se montrer efficaces, à la condition de frapper vite et fort.
Les effets possibles d’une privation d’accès des banques russes au système bancaire international de transactions (appelé « swift ») peuvent provoquer une déstabilisation totale de l’économie russe aux lourdes conséquences pour la population et pour l’économie mondiale. La question de l’intensification des sanctions économiques se pose donc et plusieurs voix en Russie nous laissent entendre qu’il s’agit d’une piste à explorer. Côté occidental, on enregistre déjà des chutes boursières spectaculaires des entreprises françaises ayant des liens importants avec la Russie (Renault, Alstom, Total). Les pays dont la dépendance au gaz russe est forte comme l’Italie ou l’Allemagne sont réticents au fait de prendre certaines mesures plus fortes. Mais le niveau actuel est notoirement insuffisant du fait que Poutine prépare son intervention depuis longtemps, il avait anticipé ce train de sanctions et il est habitué à faire avec ce type de mesures depuis 2014.
La deuxième mesure, peu commentée dans les médias, est pourtant potentiellement beaucoup plus dévastatrice pour le système économique russe et porte en elle les germes d’une déstabilisation profonde de l’ordre monétaire international. Les sanctions occidentales visent à couper la banque centrale russe de ses avoirs en réserves de change en dollar et en euro (soit près de la moitié). Cette mesure, utilisée une seule fois dans l’histoire, contre le gouvernement taliban pendant l’invasion américaine, va considérablement affecter la capacité du système économique russe à trouver des liquidités et assurer ses besoins de paiement. La chute du rouble de plus de 20%, en est la première conséquence directe, presque plus aucun acteur économique ne souhaite échanger des roubles ; la deuxième est l’entrée dans l’inconnu pour le système financier mondial qui voit un découplage complet entre le système financier occidental et russe, ce dernier n’ayant d’autres alternatives que de se reporter sur le système monétaire alternatif porté par les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud).
Les oligarques russes commencent à manifester quelques signes d’inquiétudes. Frydman, patron de Alpha Bank s’est dit être contre la guerre, ainsi que Deripaska, magnat de l’aluminium. Le mercredi 2 mars, la gouverneure de la banque centrale enregistre un message à l’attention de ses salariés les invitant à garder leur calme et leur sang-froid, en évitant de parler politique. Ceci illustre la fébrilité ambiante en Russie.