Dans la Fonction publique, 62% des agent.e.s sont des femmes et elles subissent encore de nombreuses inégalités et discriminations. Leurs salaires sont 19% en deçà de ceux des hommes car :
- Elles sont majoritairement à temps partiel ou non complet (à 82,3%)
- Elles occupent des métiers à prédominance féminine dévalorisés
- Elles accumulent des retards de carrière
- Elles touchent globalement moins de primes
A ces inégalités salariales, s’ajoutent la non-mixité des métiers, les plafonds et parois de verre, la précarisation et la non revalorisation des emplois à prédominance féminine, la non reconnaissance de la pénibilité et des conditions de travail dégradées, la persistance de violences sexistes et sexuelles, les inégalités en termes de pensions et de retraites (40%) …
L’employeur public a le devoir de faire respecter l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Il se doit d’être exemplaire et d’intégrer l’égalité réelle dans toutes les discussions et projets selon la démarche intégrée.
Or, aujourd’hui nombre de réformes, de restrictions budgétaires, sont porteuses de régressions en contradiction avec l’exigence d’égalité réelle. De nombreuses dispositions du projet de loi de « transformation de la fonction publique » remettent en cause le statut général des fonctionnaires, risquent d’accentuer les inégalités. La CGT revendique une égalité de traitement pour toutes et tous, le gouvernement entend donner plus de place à l’individualisation des rémunérations. C’est en partie par la revalorisation du point d’indice que cette égalité trouverait à se concrétiser !
Alors que la CGT revendique des emplois pérennes et statutaires et un vaste plan de titularisation, le gouvernement fait le choix de la précarité et de la flexibilité avec notamment le recours accru aux emplois non titulaires.
Alors que la CGT revendique de meilleures conditions de travail pour toutes et tous, une égalité réelle entre les femmes et les hommes ainsi qu’une prévention et lutte efficaces contre les violences sexistes et sexuelles, il remet en cause les Comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, pourtant instance primordiale pour agir dans ces domaines. Alors que la CGT revendique des carrières exemptes de discriminations, le gouvernement laisse la main aux employeurs publics pour les mutations et les avancements et réduit les Commissions Administratives Paritaires à une simple voie de recours. Alors que la CGT revendique l’application de la loi qui prévoit « un salaire égal pour un travail de valeur égal », le gouvernement n’ouvre aucune négociation sur la revalorisation des filières à prédominance féminine.
Face aux inégalités de pensions et de retraites, la CGT revendique, outre la revalorisation de ces dernières, la résorption de ces discriminations entre les femmes et les hommes. Alors que la CGT affirme que les services publics et de la Fonction publique sont des vecteurs essentiels d’égalité entre les femmes et les hommes pour l’ensemble de la population et qu’ils doivent être renforcés et dotés de moyens à hauteur des besoins, le gouvernement prévoit de vastes restructurations, abandons de missions publiques, suppressions d’emplois qui auront des incidences sur les femmes, premières usagères du service public.
La CGT revendique un projet de loi spécifique pour faire de l’égalité une réalité. Le gouvernement a fait le choix de noyer des avancées pour l’égalité dans un projet de loi qui par ailleurs risque fortement d’augmenter les inégalités entre les femmes et les hommes. Le titre V (articles 27 à 31) du projet de loi dit de « transformation de la Fonction publique » a pour vocation de transposer les dispositions d’ordre législatif de l’accord du 30 novembre 2018. La CGT reconnaît certaines avancées pour l’égalité professionnelle contenues dans l’accord issu d’une négociation « éclair » fin 2018. La CGT n’a pas signé cet accord qui comporte de nombreuses insuffisances comme l’absence de revalorisation des métiers à prédominance féminine et de la reconnaissance de la pénibilité de ces métiers, l’absence d’obligation de résultat pour les employeurs publics ou encore de budgets dédiés pour résorber ces écarts de rémunération.
Analyse du titre V :
La mise en place par les employeurs publics d’un dispositif de signalement qui peut être saisi par « tout agent qui s’estime victime d’un acte de violence, de harcèlement moral ou sexuel ou d’agissements sexistes ».
L’accord de 2018 prévoit la mise en place d’un dispositif de signalement mais également d’accompagnement, de protection, de traitement et de suivi. Il est nécessaire d’aller plus loin qu’un simple dispositif de signalement par la victime et d’orientation.
Les témoins doivent pouvoir également signaler les situations de violences sexistes et sexuelles.
Les situations de violences intrafamiliales repérées sur les lieux de travail doivent pour la CGT également être prises en compte dans ce dispositif.
Les CHSCT sont des instances essentielles qui doivent disposer de davantage de prérogatives sur la question des violences sexistes et sexuelles.
La CGT revendique le droit pour la victime de prendre part à la procédure disciplinaire, non pas comme témoin mais comme intervenante volontaire avec la possibilité d’être assistée.
La mise en place de plans d’action dont l’absence d’élaboration peut être sanctionnée d’une pénalité financière dans la limite de 1% de la rémunération annuelle globale de l’ensemble des personnels. Ces plans d’action devront être établis avant le 31 décembre 2020 et mis en oeuvre dans un délai de 3 ans renouvelables. Ces plans d’action traitent à minima des écarts de rémunération, l’égal accès des femmes et des hommes aux corps, cadres d’emplois, grades et emplois de la Fonction publique, l’articulation entre vie professionnelle et vie personnelle et la prévention et le traitement des actes de violence, de harcèlement moral ou sexuel et les agissements sexistes.
Il s’agit là d’une obligation de moyens pour une partie des employeurs publics (les communes et intercommunalités de moins de 40 000 habitants).
Le projet de loi minimise la portée contraignante prévue dans l’accord de 2018 en envisageant la pénalité financière seulement comme une possibilité en cas de non-élaboration et mise en oeuvre du plan d’action et en prévoyant que les 3 ans de mise en oeuvre soit renouvelables sans même limiter ce caractère renouvelable.
Pour la CGT, l’Etat doit être exemplaire et l’ensemble des employeurs publics doivent être soumis à cette obligation qui doit être une obligation de résultat et non seulement de moyens afin de supprimer les écarts de rémunération et les inégalités entre les femmes et les hommes, avec des budgets dédiés. L’ensemble des agent.e.s de la Fonction publique doit pouvoir en bénéficier. Les écarts de rémunération doivent comprendre tous les biais discriminants dont la dévalorisation des métiers à prédominance féminine, les temps partiels et temps non complets, la précarité, les déroulements de carrière. L’obligation de résultat obtenue par les OS dans le privé doit être étendue à la Fonction publique.
L’établissement d’un rapport annuel de situation comparée avec de nouveaux indicateurs sur les violences
L’intégration de données sur les violences sexistes et sexuelles dans le rapport de situation comparée fait suite aux propositions de la CGT.
Les données sur les promotions semblent avoir fait l’objet d’une omission dans cet article du Projet de loi.
Pour la CGT l’aspect contraignant pour l’employeur public d’établir un rapport de situation comparée doit être davantage affirmé. Des études de cohorte doivent être systématisées.
Une extension du dispositif du dispositif de primo-nominations équilibrées aux collectivités de plus de 20 000 habitants.
La loi Sauvadet de 2012 prévoyait un dispositif de primo-nominations équilibrées pour les collectivités de plus de 80 000 habitants. Il est également prévu une obligation nouvelle de nominations équilibrées pour la population en poste sur ces emplois de direction. Cette disposition est une avancée mais n’est pas suffisante. Tout d’abord, le bilan pour 2017 qui fixait un objectif de 40% n’a pas été atteint par de nombreux employeurs publics et 21 employeurs de l’Etat et des territoriaux ont été contraints à versés des pénalités. A l’Etat le taux de primo-nomination est de 36% (6 départements ministériel sur 11 n’ont pas atteint l’objectif de 40%) et à la territoriale il est de 34% (17 des 41 collectivités et EPCI ayant terminé leur cycle nomination n’ont pas atteint l’objectif légal).
Même si la part des femmes augmente chaque année, elles ne sont que 30% en 2017 à occuper un emploi de l’encadrement supérieur et dirigeant, alors qu’il y a plus de 64% de femmes en catégorie A.
La CGT revendique pour lutter contre le plafond de verre que les renouvellements et nominations dans un même type d’emploi fassent partie du dispositif de nomination équilibrée et le champ de ces dispositifs contraignants soit étendu.
La dispense du jour de carence pour les congés maladie pour les congés maladie durant la grossesse
Le gouvernement a rétabli le jour de carence pour les agent.e.s de la Fonction publique contre l’avis de l’ensemble des OS. La CGT exige son abrogation pour toutes et tous.
Il est démontré que ce dispositif pénalise encore plus les femmes que les hommes. Prenant en compte partiellement cet argument, le gouvernement avait prévu que les congés maternité fassent partie des cas de dispense mais les congés maladie afférents à la grossesse (avant et après le congé maternité) n’étaient pas compris dans cette dispense. Le gouvernement étend la dispense du jour de carence aux congés maladie durant la grossesse à compter de la déclaration de celle-ci. Or, l’ensemble des congés afférents à la grossesse ne toujours pas pris en compte dans cette disposition.
Le maintien du régime indemnitaire durant les congés maternité, d’adoption et de paternité, d’adoption
La CGT revendique la neutralisation des effets des congés familiaux sur la rémunération et la carrière. Cette disposition va dans le bon sens mais elle ne va pas assez loin et exclue la question des congés afférents à la grossesse. De même, les congés familiaux et congés maladie afférents à la grossesse ne doivent pas entraîner de proratisassions de RTT, ce qui n’est pas pris en considération par le gouvernement.
Le maintien du déroulement de carrière pendant 5 ans en cas de congé parental ou disponibilité pour élever un enfant, période assimilée à des services effectifs.
Cette disposition est une réelle avancée car elle permet de ne pas pénaliser les carrières des femmes, cependant les droits à la retraite ne sont pas acquis et cette disposition n’aura qu’un effet réduit sur les inégalités au détriment des femmes retraitées.
La loi « avenir professionnel » prévoit la même disposition pour les agent.e.s en disponibilité pour exercer une activité dans le secteur privé. Ne pas étendre ce dispositif aux agent.e.s en disponibilité pour élever un enfant ou au congé parental comportait un biais discriminant important.
Par ailleurs, une meilleure rémunération d’un congé parental mieux partagé est éludée par le gouvernement français qui refuse de transposer la directive européenne prévoyant une augmentation de la rémunération des congés familiaux.
La prise en compte de la part respective des femmes et des hommes dans le vivier des agent.e.s promouvables et celle parmi les agent.e.s promues avec des actions à mettre en place pour garantir l’égal accès des femmes et des hommes à ces promotions.
Les inégalités liées à la promotion implique une politique plus volontariste avec des études de cohorte systématiques, l’utilisation de la méthode de nuages de points afin d’identifier les inégalités dans les carrières et prévoir des budgets dédiés aux rattrapages des carrières lésées. De plus les dispositions du projet de loi concernant les commissions administratives paritaires réduisent la portée de cette disposition en réduisant les prérogatives de ces instances qui sont pourtant indispensables sur la question des promotions.
Pour faire de l’égalité une réalité, il est impératif de :
- Revaloriser les métiers à prédominance féminine et reconnaître la pénibilité de ces derniers,
- Instaurer une obligation de résultat avec des données et objectifs chiffrés pour la suppression des écarts de rémunération et des inégalités en prenant en compte tous les facteurs,
- Prévoir des budgets dédiés pour la suppression de ces écarts et inégalités,
- Neutraliser totalement les effets des congés familiaux sur la rémunération, les droits et la carrière,
- Mieux rémunérer les congés familiaux afin qu’ils soient réellement partagés,
- Prévenir et lutter contre les violences sexistes et sexuelles et garantir de nouveaux droits et protections pour les victimes.
Montreuil, le 3 avril 2019